vouloir partager ou pas...

Elle vient s’assoir sur le banc à côté de moi, à la recherche d’un petit peu d’ombre. Il faut dire qu’il est midi et que le soleil comme sérieusement à taper sur le square.

Elle accompagne ses deux petits enfants. Deux blondinets endimanchés d’environ 3 et 5 ans. De son grand sac, elle sort tout l’attirail indispensable au bon amusement  d’un gamin dans un square: pelles, râteaux, seaux et pâtés.

Elle lève le doigt, les regarde droit dans les yeux et leur dit d’un ton autoritaire :

-Attention !  Ne prêtez vos jouets à personne ! Ce sont vos jouets et je ne veux pas que d’autres enfants y touchent !

Quand un enfant arrive au square avec ses jouets, il y a toujours un drôle de phénomène qui se produit. Tous les gamins rappliquent pour découvrir la nouvelle voiture ou le nouveau ballon. C’est un peu l’histoire du pot de miel attirant les abeilles.

Au square, un accord tacite a été signé par la plupart des parents et nounous. Nous laissons les enfants s’échanger les jouets. Bon, il est clair qu’il n’est pas facile de s’y retrouver au moment du départ. Les jouets passent de mains en mains et il n’est pas rare que je mette un certain temps avant de mettre la main sur la voiture rouge ou bleue de mon fils. Néanmoins, nous privilégions la notion du partage. Visiblement, la grand-mère ne semblait pas au courant de ce « pacte ».

Ce qui devait arriver, arriva ! Une petite fille de 2 ans environ, typée Afrique du Nord, s’approche des jouets des garçonnets (l’effet, « pot de miel », rappelez-vous). Elle s’empare d’un râteau gisant sur le sable. La grand-mère se lève d’un bond, comme un chien enragé voyant débarquer le facteur. Elle aboie :

-lâche-ça, tout de suite !

La gamine la regarde d’un air étonné, le râteau toujours à la main.

La mamie hausse le ton de plusieurs décibels. Limite, le filet de bave au coin des lèvres.

-lâche-ça, je te dis ! Ce n’est pas ton râteau ! Tu ne joues pas avec les jouets de mes petits-fils !

La fillette reste perplexe et ne lâche toujours pas le râteau.

C’en est trop pour la grand-mère, qui se précipite sur la petite et l’empoigne par le bras. Sur ce, le père rapplique et demande ce qu’il se passe. Trop éloignée, je n’entends pas la réponse du pitbull. J’imagine, cependant, qu’elle se plaint du comportement de la gamine. Le père récupère son enfant dans les bras et dit calmement :

-Les parents donnent l’éducation qu’ils souhaitent à leurs enfants. Nous, nous, privilégions le partage !

La grand-mère lui tourne alors le dos, direction le banc. Elle me regarde et  me dit (cherchant mon appobation) :

-ce sont toujours les mêmes qui souhaitent le partage (sous-entendus « les magrébins !)

J’étais tellement sur le Q que je n’ai pas su quoi répondre à cette mamie qui devait indubitablement voter très très très à droite. Une telle violence verbale et physique sur une enfant de 2 ans…

J’ai ramassé les jouets de mon fils et je suis partie avant qu'il ait la très mauvaise idée d’endormir ceux des deux petits garçons.

Comments

[Harry]

Sympa tes chroniques du bac à sable. Un vrai raccourci de la vie : cruel et fondé sur les rapports de force.
Je me demande ce que cette dame vient faire là si elle ne veut rien partager. A moins que c'est sa première fois; ce dont je doute vu que c'est une grand-mère.